lundi 21 octobre 2013

Ombres – S.Lee – 44 p. - Kaléidoscope – 2010 – 15 €


Cet album ne contient pas de texte. Son format à l’italienne offre une tourne de page à l’horizontale. Tout l’album repose sur la pliure du livre. Cette pliure est une limite, un axe de rotation et une frontière entre deux mondes. Dès le dos de la première de couverture, l’histoire commence avec cet unique mot de l’album (même s’il est répété plusieurs fois) Clic ! A la tourne de page, la lumière s’allume et éclaire une remise où une petite fille regarde tous les objets présents dans la pièce. Elle tient dans une main le cordon d’allumage de la lampe et dans l’autre une pomme qu’elle croque. Elle remarque que l’éclairage du plafonnier lui permet de voir devant elle toutes les ombres : le vélo accroché au mur, l’aspirateur, le tuyau d’arrosage, les outils. Elle fait quelques pas de danse pour observer son ombre qui danse aussi. D’ailleurs elle se sert de ses mains pour projeter au sol un oiseau en ombre chinoise. Non seulement un bel oiseau apparaît mais les ombres du balai, du plumeau et du skateboard prennent quelques libertés. Elles se transforment et se détachent de la forme de leurs objets initiaux. Au fur et à mesure de ces idées, la petite fille imagine et donne vie à tout un monde qui l’enchante. Un éléphant, un crocodile, une forêt tropicale et même un loup entrent dans sa danse et dans ses jeux. Mais le loup fourbe décide de vivre sa vie et il a faim ….Cet album scindé en deux à la pliure propose donc sur la page du haut une version de la petite fille dans sa remise dont elle aménage les objets pour créer des ombres et la page du bas qui représente ses projections oniriques. Les rêves entrainent parfois des cauchemars dans lesquels s’expriment nos peurs enfouies. Prise dans son jeu de création imaginaire, la petite crée un loup, est un loup et est poursuivie par ce loup qui la dépasse et se libère de sa créatrice. Heureusement la petite fille est plus maligne que lui et elle saura faire preuve de ruse et d’adresse pour l’apprivoiser. Une peur apprivoisée n’est plus une peur. Elle est libérée et s’est affranchie de son angoisse, en un mot elle a grandi ! Cet album nécessite plusieurs lectures. La première est consacrée au récit et à la compréhension de l’histoire. Puis chaque relecture permet de vérifier la place des objets et des ombres créées. Adulte et PetitProche cherchent à quelle page l’imaginaire se déclenche. A quelle page le monde réel disparaît et à quel moment il réapparaît. Chacun vérifie la cohérence de l’ombre avec son objet. On se met d’accord sur les objets disparus ou qui ont changé de place. La construction de cet album sur le jeu d’ombres est passionnante. Les illustrations sont délicieuses. Le trait fin ou appuyé permet de donner vie aux objets les plus banals. Les expressions de la petite fille soulignent toute son espièglerie et toute sa vie intérieure. La chute laisse la place à une interprétation libre qui permet d’échanger sur les versions de chacun. MoyenMoyen ne peut pas s’empêcher de mettre en voix cet album. Il crée des dialogues fantasques, il imagine les ordres dictés par la petite fille (il lui donne des conseils aussi !). J’ai retrouvé un peu de Peter Pan et du Pays des garçons perdus dans cet ouvrage. Blanc, noir et jaune sont les trois seules couleurs utilisées. Ces couleurs rythment et symbolisent les deux mondes. Le jaune est la couleur de l’imaginaire, de ce pays merveilleux qui nous échappe
définitivement à l’âge adulte. Après son périple, la petite fille rejoint le monde réel avec une robe jaune rayonnante. Elle est dorénavant marquée du sceau des enfants qui sont allés visiter et embellir ce monde perdu. Je le conseille comme un ouvrage qui deviendra un usuel de la bibliothèque familiale. Chacun se souviendra de cet album innovant donc la puissance évocatrice marquera le lecteur. Comme tout ouvrage « extraordinaire », il peut déstabiliser les lecteurs adultes qui n’ont rien à dire et rien à lire. Peut-être que l’enfant sera le meneur d’histoires de cet ouvrage, le PetitProche saura le décrypter pour aider l’adulte à se souvenir des voies magiques du Merveilleux. Dès 6 ans.

 

Mirror – S.Lee – 48 p. - Seven Footer Press – 2010 – 12.15 €
 
Si ces jeux d’ombre vous intéressent ou s’ils passionnent vos enfants, n’hésitez pas à lire et découvrir Mirror du même auteur. Dans cet album, Suzy Lee interprète la pliure de l’ouvrage comme un axe de symétrie. Son livre est construit avec la pliure comme un miroir imaginaire. Une fois de plus, aucun texte. Tout le récit est visuel. Une petite fille est prostrée dans un coin de la page. Elle porte une robe jaune (encore !). Elle tourne la tête et aperçoit son reflet dans le miroir. A chaque page, elle oublie son chagrin et joue avec cette petite fille qui l’imite. Elles sont donc deux à jouer, danser et grimacer pour oublier les difficultés d’être un enfant. Au hasard d’un pas de danse, leurs mains se touchent et tout un monde onirique apparaît, les couleurs explosent, les petites filles ne forment plus qu’une seule et même personne jusqu’à disparaître de la page. On les imagine parties dans un monde imaginaire fécond et intime qui n’appartient qu’à elle (s). Elles réapparaissent virevoltantes et sautillantes de joie ! Malheureusement le reflet de la petite fille prend des libertés et décide d’esquisser ses propres pas de danse. Notre jeune héroïne est révoltée. Elle n’accepte pas que son reflet ait sa vie propre. Elle boude, elle s’énerve et finit par commettre l’irréparable … Cet album et Ombres se font vraiment écho. De nombreux clins d’œil thématiques, graphiques sont à relier. Suzy Lee a le don de m’entraîner dans un monde onirique et pourtant très ancré dans la réalité de l’enfance. MoyenMoyen a eu un peu plus de mal à apprécier ce livre. Pourtant il passe beaucoup de temps à jouer avec son reflet dans le miroir de plain-pied de la salle de bains. Lorsque je lui ai rappelé ce détail de sa vie, il m’a fait remarquer d’un ton ferme et qui n’attend pas de réplique que lui ne danse pas devant le miroir, il regarde « comment il est grand ! ». Peut-être que les garçons ne jouent pas comme les petites filles … ou qu’ils ne veulent pas l’admettre …
N’hésitez pas à consulter le site de l’auteur : http://www.suzyleebooks.com


La Vague – S.Lee – 44 p. - Ecole des loisirs – 2011 – 5.60 €/12.54 €

Dans quelques jours, les valises seront bouclées, les enfants harnachés dans leurs sièges auto … J’entends déjà le moteur ronronner. J’ai le goût du sel sur le bout de la langue. Les vacances sont à portée de main … Afin d’attendre patiemment la libération et le départ, je vous conseille la Vague du même auteur. Les enfants seront passionnés par cet album dont une fois de plus la pliure n’est pas que le centre physique de l’album, elle est le centre du récit. Dans ce livre à l’italienne, sans texte, la pliure est une frontière invisible et symbolique. Sur une plage, une petite fille découvre la plage et particulièrement les vagues qui viennent lécher le bout de ses pieds. Un peu effrayée et hésitante, elle avance quand la mer reflue et recule quand les vagues se rapprochent. Elle se trouve sur la page de gauche et la mer sur la page de droite. Chacune reste sur sa page et sur son côté de la plage. Les vagues se cassent toujours à la pliure de la page. Accompagnée par quelques mouettes, la petite fille s’enhardit de plus en plus. Elle se rapproche des vagues et finit par traverser la frontière invisible pour jouer dans l’eau. Page après page, la petite fille prend confiance et joue avec les vagues qui deviennent une vague personnifiée. Cette vague bleue et majestueuse enfle. Elle devient énorme et bouillonnante. La fillette a peur et se réfugie dans la page de gauche mais la vague va-t-elle suivre les règles du jeu ? MoyenMoyen n’a pas mis ses brassards pour s’immerger dans cette Vague. Il aime créer les dialogues entre la petite fille et la vague ou la petite fille et les mouettes, c’est selon son inspiration. Il se souvient comme les vagues peuvent être effrayantes. Les illustrations sont magnifiques. La petite fille ressemble beaucoup à celle d’Ombres. J’ai apprécié de retrouver le jeu de la robe qui se colore à la fin de l’album. Dans la Vague, la robe de la petite fille devient bleue. Sur ce thème maritime, Suzy Lee a travaillé sur le bleu, sa profondeur, ses nuances et ses multiples variations. Les illustrations sont réalisées au fusain, à la peinture acrylique et finalisées en montage numérique. Les traits de pinceaux, les aplats de couleur permettent de donner vie à la vague et on imagine le flux et le reflux, on entend le ressac … Dès 5 ans.
Si vous voulez approfondir votre connaissance du bleu, je vous conseille d’ajouter dans votre panier de plage !


Un bleu si bleu - J.F.Dumont – 24 p. - Père Castor/Flammarion – 2006 - 5.50 €
Un jeune garçon décide de parcourir le monde à la recherche d’un bleu rêvé, un bleu profond et lumineux ! Les pages liminaires proposent une palette de bleus incroyables …Dès 6 ans.





Si vous avez envie de plage et de vagues, je vous conseille

Rêves d’Océan – D.Nolan – 38 p. - Petite Plume de Carotte – 2012 - 14.50 €

Cet album sans texte est magnifique. Une petite fille construit un château de sable. La nuit se lève. Elle quitte la plage à marée montante. Les vagues détruisent peu à peu le château  Alors qu’il ne reste plus que le donjon, une des fenêtres s’illumine … Sans un mot, tout en douceur et en rêve, le lecteur est entraîné dans un monde poétique et lilliputien sans fin ! Dès 5 ans.




Si vous aimez la mer quand elle est déchaînée et que la plage est déserte, je vous conseille

la Vie en bleu – C.Norac/S.Poulin – 32 p. - l’Ecole des Loisirs – 2006 - 12.50 €

Sur une île, un jeune garçon attend le retour de son père, marin pêcheur. Malheureusement une tempête se lève et les communications par radio sont rompues. Yannick décide alors d’aller sur la plage pour dompter les flots … Un album dont le suspens est intense. Les illustrations très réalistes sont en même temps complètement oniriques et reflètent les angoisses de Yannick. Dès 6 ans.